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Exclusif|Le diffuseur de la Ligue 1 pour les cinq prochaines années est à peine arrivé qu’il fait l’objet de nombreuses critiques. Le prix de l’abonnement est pointé du doigt et de plus en plus de spectateurs optent pour l’illégalité. Brice Daumin, le patron de DAZN France, nous répond.
« Au moins, ironise-t-il dans un sourire au moment de se quitter, plus personne ne se demande comment on prononce DAZN. » Depuis qu’il a intégré le marché français, on a énormément parlé du nouveau diffuseur de la Ligue 1, sur les réseaux sociaux ou dans les médias. Malheureusement, pas toujours en bien : si son sens de l’humour reste intact, Brice Daumin, PDG de DAZN France et Suisse, est à la barre d’un navire dont l’entrée dans les eaux tricolores a été accompagnée d’une tempête, et d’un assaut de pirates jamais vu. Après trois journées de championnat, il fait un premier point, plus décidé que jamais à défendre son modèle, qu’il voit s’inscrire dans la durée dans l’Hexagone.
Après trois journées en tant que nouveau diffuseur de la Ligue 1 en France, quel bilan tirez-vous ?
BRICE DAUMIN. On est vraiment contents de ce qu’on a fait en si peu de temps. Une mise en place et une exécution aussi rapides et sans un bug, personne ne l’a fait avant… Bravo DAZN ! (Il rit.) La signature du deal avec la LFP (Ligue de football professionnel), c’est le 30 juillet ; au 16 août, date de Le Havre - PSG, on avait monté toutes les équipes, recruté 50 personnes sur la production, trouvé tous les prestataires, mis en place des offres, la transmission et tous les deals de distribution. On partait de zéro complet, et tout a fonctionné à la perfection. On savait qu’on n’avait pas le droit à l’erreur.
Cette mise en place express a-t-elle représenté des défis particuliers ? Y a-t-il certaines choses que vous avez voulu mettre en place que vous avez dû reporter faute de temps ?
Ce qui était important, c’était d’être présent dès le premier match. On a eu très peu de temps et la preuve, la première fois que je rencontre tous les clubs de Ligue 1 pour expliquer ce qu’on va faire, l’approche éditoriale, c’est le 11 août. Le premier match, c’est le 16. Maintenant, on est un nouvel acteur : il faut écouter, comprendre, regarder ce qui fonctionne, ce qu’il y a à améliorer. Ce n’est que comme ça qu’on va construire quelque chose de pertinent. Est-ce que ce qu’on a fait jusqu’à présent, c’est comme ça qu’on va faire les cinq années qui viennent ? La réponse est non.
Vous avez aussi détonné avec une offre éditoriale en apparence réduite, avec moins de journalistes sur certains matchs, un ton léger, pas d’émissions…
Alors contrairement à ce qui a été dit çà et là, DAZN ne commente pas en cabine, tout est commenté sur place et on a toujours trois journalistes minimum, dont un commentateur et un bord terrain. Après, selon l’ampleur du match, vous allez avoir un dispositif différent, avec des personnes comme Walid Acherchour ou Paul de Saint-Sernin, qui apportent quelque chose de différent. On vient d’un monde plus digital, donc on veut amener quelque chose de nouveau pour être proche du fan de foot. C’est comme ça que l’on fonctionne : pertinence, légèreté, immersion.
Combien d’abonnés avez-vous aujourd’hui ?
(Il rit.) C’est une excellente question ! On a signé un deal sur cinq ans : c’est un marathon. On est dans une phase de montée en puissance. C’est trop tôt pour communiquer quoi que ce soit en termes de résultat. Le bilan, c’est certain qu’on va le partager, mais pas maintenant.
Cela fait un an que DAZN se positionne sur la Ligue 1, et la LFP n’a fait affaire avec vous que tardivement, en vous laissant peu de temps pour vous implanter. Est-ce que ce sont les meilleures bases pour construire une relation de confiance ?
C’est certain, si on avait eu six mois pour se lancer, on aurait été extrêmement contents. On a discuté pendant des mois avec la Ligue, on a été les seuls présents du début à la fin. La LFP n’aurait pas signé avec nous si elle n’avait pas confiance : nous sommes un acteur solide, reconnu, on l’a prouvé dans les 200 pays où on est installés, on diffuse 15 000 matchs de football par an en direct en Europe et pas loin de 90 000 événements sportifs dans le monde.
Le prix de l’abonnement peut-il évoluer ? Sous quelles conditions ?
Si on regarde l’évolution de l’accès à la Ligue 1, et « Libération » en a fait un article très détaillé, le prix n’a fait que baisser. La conclusion de cet article, c’est que DAZN, avec une offre à 29,99 €, même en faisant l’addition de BeIN Sports à 15 € par mois, ce n’est pas plus cher que ce qui a existé auparavant. Tout le monde parle du prix en disant que c’est plus cher. Mais plus cher par rapport à quoi ?
Avez-vous envisagé, comme cela a pu être évoqué, de proposer un abonnement « à la carte », club par club ?
S’il y a des choses pertinentes, malignes, à imaginer, on va le faire. Techniquement, on sait quasiment tout faire en termes d’offre, on a une modularité chirurgicale et aucune contrainte technique. Construire des offres spécifiques, quels que soient les paramètres, on en est capables. Plein de choses sont possibles : si on a envie de mettre un match gratuit, ou même une mi-temps, le dernier quart-temps d’un match de basket. S’il y a un besoin, une opportunité, ça fait évidemment partie des choses qu’on veut travailler.
Le lancement de votre chaîne a été accompagné d’un boycott massif et d’une recrudescence du piratage. Comment lutter contre ce phénomène ?
Le sujet du piratage, c’est une catastrophe. Mais pas que pour DAZN : le sujet concerne le marché de manière générale. Le piratage, c’est du vol. Il ne faut pas l’appeler autrement. Aujourd’hui, on a une promotion du piratage qui est faite dans la presse, sur l’usage illégal d’accès aux contenus, et c’est un scandale.
Une promotion ?
Aujourd’hui, quand vous lisez que Telegram est « une alternative à DAZN »… C’est faux et archifaux. C’est le vol qui est une alternative à DAZN. Et ceux qui sont derrière ça ou l’IPTV, ce sont des organisations criminelles, mafieuses, pédocriminelles, il faut l’avoir en tête. Mais aujourd’hui, il y a une banalisation de ça. Que ce soit les ayants droit, les organisations politiques, les acteurs du marché : aucun ne s’est prononcé sur ce qu’on a vécu ces trois dernières semaines sur le piratage. Il faut des prises de position fortes, fermes, et des plans d’action qui soient clairs, établis et mis en œuvre. C’est le seul pays dans lequel DAZN arrive où on vit une telle situation. On n’a jamais vu ça ailleurs.
Selon un sondage Odoxa, « les offres de DAZN n’attirent pas les foules (15 % des sondés) et les amateurs estiment qu’elles incitent à suivre la L 1 illégalement (65 %) ». Envisagez-vous que votre offre ait pu avoir cet effet sur les spectateurs ?
Il faut vraiment séparer le prix de la question du piratage. Quand vous allez chez le concessionnaire, vous ne vous dites pas : « Cette voiture me plaît, mais elle est trop chère, je la vole. » Encore une fois, il faut rappeler ce que sont la piraterie et tous les systèmes criminels qu’il y a derrière : usurpation d’identité, vol de coordonnées bancaires… C’est ça, le piratage. Les personnes qui sont derrière, ce ne sont pas des philanthropes.
Alexandre Aflalo