Conference sur les stades...
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Une conférence exceptionnelle sur les stades
A enjeu majeur, réponse ambitieuse. Durant deux jours à Paris, la LFP et l'ESMA ont organisé les 18 et 19 novembre à Paris la "Conférence Stades : de la conception à l'exploitation" réunissant près de 300 personnes dont 50 intervenants. Clubs, élus locaux, architectes, ingénieurs, avocats, banquiers, les débats ont été riches et variés avec en filigrane une ambition : doter la France de stades modernes pour le développement de nos clubs et organiser l'Euro 2016. De l'état des lieux à la faisabilité financière, de nombreux thèmes ont été abordés. En voici un tour d'horizon.
1. Pour des stades lieux de vie
Dressant un état des lieux des stades français, Xavier Daniel (responsable du service Stades de la LFP) et Stéphane Pottier (Délégué Général de l'ESMA) ont souligné le retard "historique" de la France par rapport à son voisin anglais, berceau du sport moderne. Ce retard effectif dès le début du 20ème siècle est toujours d'actualité. Suite aux drames du Heysel, de Hillborough et de Bradford, les Anglais ont engagé durant la décennie 1990 un grand mouvement de modernisation et de sécurisation des stades. En France, la Coupe du Monde 1998 a constitué un échec de ce point de vue, l'investissement se concentrant en grande partie sur la construction du seul Stade de France. Conséquence, les stades français, à l'inverse de leurs concurrents anglais et allemands, sont restés limités à l'organisation de match du club résident. La multifonctionnalité n'existe pas et l'espace dédié aux loges et aux sièges à prestation demeure très réduit. L'enjeu des années à venir consiste donc à faire sortir de terre des stades de cinquième génération en France. Conçues comme des lieux de vie, ces enceintes ne peuvent plus tourner le dos à la ville mais doivent accompagner le développement d'un quartier ou d'une ville. Elles répondent également à l'enjeu majeur du développement durable et doivent intégrer la dimension esthétique. Le stade moderne est un totem. Il doit renvoyer une image forte et positive, au service du club, de la ville et des spectateurs. Un sondage sur les attentes du public dans les stades dévoilé par le Directeur du développement d'Ipsos Joachim Soetard a d'ailleurs révélé que 82% des spectateurs se déclaraient favorables à l'arrivée de stades de nouvelle génération en France. Vous retrouverez dans le prochain numéro de Footpro Magazine, le mensuel de la LFP, un compte rendu très complet de cette étude.
2. La gestion du projet
Selon la complexité du projet à conduire, le maître d'ouvrage peut disposer en interne de l'expérience et des compétences nécessaires à sa réalisation. Toutefois, la gestion du projet de construction d'un stade fait aujourd'hui appel à des expertises nombreuses et à des compétences extérieures dans la plupart des cas et ce tout au long du processus, de l'étude du projet à sa réalisation. Au cours de la conférence, Philippe Stinglhamber (Directeur Développement Terrell Group) et Thierry Berger (Chargé de projet SETEC) ont notamment détaillé les différentes étapes d'un projet de stade (Décision de construire, faisabilité-programmation, conception, construction, exploitation) et la logique à suivre pour que le projet soit une réussite.
3. Quelle place pour le club dans l'exploitation du stade
Une vingtaine de projets de stade sont en cours actuellement en France pour un montant d'investissement prévu de 1,7 Milliard d'euros. Dans un univers traditionnellement du ressort des collectivités locales, la perspective d'une exploitation commerciale implique un recours de plus en plus fréquent à des financements privés. Au cours de la conférence, Eric de Fenoyl (Avocat au sein du Cabinet TAJ) a fait une intervention remarquée sur la place de la puissance publique et les différents schémas juridiques de financement et d'exploitation. Au cours d'une table ronde, les clubs du LOSC et du MUC72, en compagnie des collectivités locales et des exploitants ont expliqué le montage juridique choisi et les droits de chacun dans l'exploitation de l'enceinte.
4. Le marché du naming
L'utilisation du naming, complémentaire des autres sources de financement, constitue un phénomène transeuropéen dans lequel la France n'est pas encore totalement entrée, sans doute pour des raisons culturelles. Alors que l'Allemagne (avec 21 stades nommés), l'Angleterre (14) et les Pays-Bas (11) dominent ce marché, la France, à l'instar de l'Europe du Sud, commence à peine à l'aborder avec la future MMArena du Mans. Spécialistes de la question, Nicolas Bailly et Ulrik Ruhnau (Sportfive) ont dressé un panorama du sujet en Europe. Après les secteurs de l'énergie, de l'assurance et de la banque, les opérateurs téléphoniques prennent actuellement le relais, à l'image d'O2. En majorité, à l'instar des Européens, les Français sont favorables à la vente des droits de nomination d'un stade comme source de revenus pour les clubs.
5. Les cas concrets
La conférence Stades a constitué l'occasion de présenter de nombreux cas concrets ou projet à venir. John Beattie, Stadium Manager d'Arsenal et Président de l'ESMA, a décrit la conception et l'exploitation de l'Emirates Stadium. Patrick Iliou (Directeur Général Adjoint de l'OL) a fait une présentation très appréciée d'OL Land, en insistant notamment sur les enjeux de la localisation du stade. Cette riche présentation d'un des projets français de référence, réalisée en présence de l'architecte du stade, John Barrow du cabinet HOK Sport, a été notamment l'occasion de confirmer la date de mai 2013 pour la livraison de cette enceinte ultra moderne de 62.000 places. Pierre Ferret, architecte du Grand Stade de Lille, a mis l'accent sur le caractère multifonctionnel de l'enceinte, qui sera livrée en 2011.
Toujours dans le domaine de la multifonctionnalité mais en partant de l'exemple du stade des Arizona Cardinals de l'Université de Phoenix, Peter Fervoy (Directeur du Développement chez Uni-Systems) a expliqué les avantages de posséder une enceinte dotée d'une pelouse et d'un toit rétractables. Jose Ramon Capdevila Xam-Mar (Analyste de la planification stratégique au Real Madrid) a dévoilé les projets d'une Real Madrid City au nord de la ville. Mais ces deux journées n'ont pas été simplement consacrées à des projets de très grandes dimensions. Gestionnaire des infrastructures du stade de la Maladière de Neuchâtel, Jean-Pierre Jacquet a ainsi présenté un exemple parfait de réussite de stade multifonctionnel de 12.000 places, pour un club et une ville de moindre importance.
6. Une ouverture internationale
On ne peut pas mettre Wembley à Dijon ou le stade Auguste-Delaune à Londres. La pertinence de l'investissement au regard de l'utilité du stade a été finalement analysée par Andrew Williams, l'un des plus éminents économistes dans le monde au sein du cabinet d'études Franklin + Andrews. La conférence ne s'est pas limitée aux seuls stades de football. Vice-président d'AEG, société en charge de l'exploitation du Staples Center à Los Angeles et de l'O2 Arena à Londres, Brian Kabatznik a expliqué le principe de la multifonctionnalité aux enceintes recevant les sports de salle, type Palais Omnisport de Paris-Bercy. En conclusion de son intervention, Brian Kabatznik a rappelé l'intérêt d'AEG pour le marché français.
7. Stade et spectacle audiovisuel
C'est une évidence, le stade doit être pensé pour les besoins du spectateur. C'est une autre évidence, mais elle n'est pas toujours mise en application, il doit également être conçu pour le téléspectateur. Stéphane Dor (Directeur Marketing et Médias de la LFP), François-Charles Bideaux (Réalisateur - HBS) et Caroline Costedoat (Architecte – Keneo) ont expliqué les contraintes du producteur, la nécessité pour les architectes de consulter des experts de la télévision pour prendre en compte les besoins des médias, et l'importance de proposer des stades harmonieux pour les caméras, afin de filmer le spectacle du football de la manière la plus valorisante.
8. Revenus billetterie
Animé par François Hildbrandt (Ineum), Rémi Leonnetti (Coupe du Monde de Rugby 2007) et Olivier Radtke (CTS Eventim), cet atelier a permis de juger de la marge de progression dont disposent les clubs français dans ce domaine. La place des recettes de matches dans l'économie des clubs reste trop faible par rapport aux concurrents européens. Le développement très important du e-ticketing, domaine dans lequel la Ligue 1 est plutôt en avance sur ses voisins européens, les nouveaux modes de commercialisation des matches et le développement des outils CRM (grâce notamment à l'informatisation du stade) constituent les solutions pour rattraper ce retard. L'exemple de la politique commerciale de la billetterie de la Coupe du Monde de Rugby 2007 a également été développé pour montrer un cas d'optimisation des recettes de la billetterie reposant notamment sur les attentes des acheteurs eux-mêmes.
9. Optimiser son catering
Cet atelier de travail animé par Nicolas Bailly (Sportfive), Arnaud Pinta (Stade de France) et Gérard Saint-Etienne (Jump2Tickets) a dressé tout d'abord un état des lieux rapide montrant combien la France possède un grand retard en terme d'offre de sièges à prestation. A l'exception du Stade de France, le ratio des places à prestation dans les stades de Ligue 1 est plus de deux fois inférieur à celui des stades allemands pour la saison 2008-2009. Ce déficit de places en loges et sièges affaires, dont les différences ont pu être détaillées, est le principal handicap des stades français car ce sont les sièges générant les plus hauts revenus. Ainsi, dans un stade moderne, les revenus d'hospitalité peuvent générer 40 à 50% des revenus du club issus du stade. Les enceintes comme la Veltins Arena de Schalke 04 et la Nordbank Arena de Hambourg ont illustré les exemples à suivre dans ce domaine.
10. Pelouses synthétiques
La FIFA et l'UEFA autorisent depuis le 10 novembre 2004 le déroulement de matches de compétitions officielles sur terrains en gazon synthétiques nouvelle génération. Le 25 mai 2008, le conseil d'administration de la LFP a levé l'interdiction de l'utilisation de la pelouse synthétique. Directeur principal de la FIFA, Nigel Fletcher a présenté l'ensemble des expérimentations et avancées dans ce domaine.
11. Ecostadium
Comme la plupart des activités économiques, la construction ou la rénovation des enceintes sportives n'est pas neutre en termes d'impact sur l'environnement. Les stades modernes demandent de plus en plus d'énergie pour satisfaire les besoins de tous (éclairage, écrans, restauration, chauffage des pelouses, etc…). Dans ce contexte, tous les projets de nouveaux stades ont pour objectif commun de rendre leurs dépenses énergétiques. C'est le cas notamment du Stade de France. Responsable du développement durable et performances au Stade de France, Xavier Parenteau a présenté les objectifs de l'enceinte dans ce domaine après que Benjamin Cimerman, ingénieur chez RFR Eléments, ait pu exposer les enjeux du développement durable appliqué au bâtiment au sens large. Toujours dans une logique de mélanger les interventions de cadrage et les exemples concrets, ce thème aura été l'occasion d'une présentation du contexte "écologique" de la reconstruction du nouveau stade national de rugby de Lansdowne Road de Dublin par François Clément, architecte du cabinet HOK Sport.
12. Faisabilité financière
Délégation de Service Public (DSP) à l'exemple du stade du Mans, Contrat de Partenariat Public-Privé (PPP) comme le stade de Lille, Bail Emphytéotique Administratif (BEA) à l'image du stade de Lens ou encore Initiative Privée comme le stade de Lyon, le choix du montage juridique a des impacts forts sur les plans de financement à mettre en œuvre. Christian Rasoa (PWC), Daniel Zerbib (Clifford Chance), Michel André Volle (HSBC), Jacques Messeca (Eversheds) ont expliqué les attentes et les contraintes du prêteur dans chaque cas évoqué, et les clefs du succès pour la mise en place du financement. A la suite de cette table ronde, Sébastien Bazin, président de Colony Capital Europe, actionnaire majoritaire du Paris Saint-Germain, a brillamment rappelé ses objectifs pour le Parc des Princes en tant qu'investisseur privé. Sachant manier l'humour avec brio, Sébastien Bazin a indiqué qu'il souhaitait faire évoluer la concession accordée par la Ville de Paris pour exploiter le Parc des Princes. A ce sujet, une rencontre avec le Maire de la capitale devrait avoir lieu en début d'année prochaine.
13. Le stade, clef de voûte de la compétitivité du football professionnel
Deux semaines après la présentation de son rapport pour accroître la compétitivité des clubs français, le Secrétaire d'Etat à la Prospective Eric Besson a commenté la partie de ses travaux concernant spécifiquement le domaine des stades avec la conclusion suivante : "Le stade est la clef de voûte de la compétitivité du football professionnel. Ma conviction profonde est que nous allons vers la maîtrise des stades par les clubs. Il me semble qu'à l'avenir les clubs deviendront soit propriétaires de leur stade soit, a minima, auront la maîtrise de son exploitation".
14. «Maintenant ou jamais !»
Le président de la LFP Frédéric Thiriez a souligné combien le dossier était d'actualité en dépit d'un contexte financier et économique a priori défavorable "Malgré la crise et peut-être même à cause d'elle, jamais autant de chances n'ont été de notre côté pour rattraper notre retard. Ne voyez pas dans cet acte de foi une preuve d'optimisme béat mais simplement l'expression d'un constat. La dernière réunion du G20 à Washington a sonné l'heure des politiques nationales de relance économique, notamment sous l'impulsion du Président Sarkozy. Si les chefs d'état et de gouvernement condamnent tout recours au protectionnisme, ils recommandent des mesures budgétaires pour stimuler la demande interne avec des résultats rapides. L'Italie vient d'annoncer un programme de grands travaux pour un montant de 80 milliards d'euros. Quel beau chantier pour la France que la construction de ces nouveaux stades pour 2016 ! Pour rattraper notre retard, c'est maintenant ou jamais ! En cela, je suis certain que cette conférence fera date. Je tiens à remercier tous les intervenants et tous ceux qui se sont déplacés pour échanger et enrichir cette réflexion qu'ils soient élus, représentants de collectivités locales, membres de direction des clubs, architectes, juristes, chacun a apporté sa contribution dans un débat. Je remercie tout particulièrement l'ESMA, son président John Beattie, Stéphane Pottier et Aymeric Magne, et toutes les équipes de la LFP autour d'Arnaud Rouger et Xavier Daniel".
Source :
www.lfp.fr
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