un article qui cause de Mammadov et Sheffield Wednesday mais aussi indirectement les Lensois!
"Mammadov et Sheffield Wednesday : ça bloque
Malgré les deux communiqués publiés sur le site officiel de Sheffield Wednesday ces dernières semaines avec les dires de Hafiz Mammadov et sa joie d’avoir racheté les Owls, la Football League n’a toujours pas ratifié le rachat. Pire, Le Parisien annonce aujourd’hui que ses fonds seraient gelés. Petit décryptage avec l’aide d’un journaliste azéri.
Début juin, Milan Mandaric et Hafiz Mammadov trouvaient un accord de principe pour la vente de Sheffield Wednesday (D2 anglaise) autour de £36 millions. Peu après, les deux hommes font publier un communiqué sur le site officiel annonçant la reprise par l’actuel propriétaire du RC Lens. On voit même le duo en photo, tout sourire.
Rapidement, le staff de Sheffield Wednesday reçoit des profils détaillés des joueurs lensois et le manager, Stuart Gray, évoque même une collaboration entre les deux clubs. De puissants agents contactent les Owls, comme l’un des conseillers de Brandao. Le Brésilien s’était même déplacé à Hillsborough et avait réclamé environ £25 000 par…semaine pendant deux ans ! Étrangement, ce sont plus les deux années de contrat qui ont fait capoter l’affaire que le salaire, même si Gray savait pertinemment que la vente n’avait pas encore été ratifiée par la Football League, organe gérant la D2, D3 et D4 anglaise.
Des comptes bancaires dans trois continents
En théorie, la FL met un certain temps avant de valider un rachat. La procédure est d’ailleurs toujours longue entre l’ancien propriétaire et le nouveau, sauf dans de rares cas comme à Leyton Orient (D3) récemment (ndlr, et encore, ça a mis quelques semaines). Lorsque Mandaric avait revendu Leicester en 2010, cela avait d’ailleurs pris deux mois et demi pour être finalisé.
Néanmoins, l’attente est désormais trop longue pour croire à la lenteur de la Football League. Il y a un problème. Bizarrement, Mammadov s’était déplacé à Londres il y a deux bonnes semaines pour rencontrer Mandaric et finaliser le rachat de toutes les parts de Wednesday. Ce qui voulait déjà dire que le premier communiqué sur le site officiel du club était erroné, les deux hommes n’avaient pas trouvé un accord définitif. En cause, l’échelonnement du paiement et les conversions des devises monétaires. « Mammadov a dit à Mandaric qu’il paierait depuis plusieurs comptes bancaires », nous expliquait-on. « Il lui a parlé de comptes sur trois continents différents avec trois devises différentes, ce qui engendrerait des taxes colossales pour la conversion. C’était l’un des points de désaccord car ça représentait une somme à sept chiffres […] Il y avait aussi une large partie des fonds qui venait directement d’Azerbaïdjan. »
Hafiz Mammadov et Gervais Martel
Que cette photo et les sourires l’accompagnant semblent loin aujourd’hui…
Témoignage d’un journaliste azéri exilé
Sonder les business de Mammadov est impossible. Tout est cadenassé, verrouillé. Un journaliste azéri exilé, sous couvert d’anonymat, nous avait contactés. Extraits des nombreux mails échangés :
« Quand j’ai voyagé, j’ai vu la différence avec mon pays. Bakou est une très belle ville, incroyablement moderne. Tout est centralisé autour de notre capitale, mais tout est globalement contrôlé. La presse est financée directement par les gens ayant de l’argent : le pouvoir en place, les grands industriels et autres personnes ayant fait fortune. Mammadov a toujours été un ami du pouvoir. Il a obtenu des marchés sans appel d’offre ou de concurrence, comme son entreprise de taxi à Bakou. Vous ne pouvez prendre que sa compagnie. D’autres ont essayé de se monter, mais elles ont toujours été démantelées.
Avant, on faisait – c’est l’une des raisons m’ayant poussé à quitter l’Azerbaïdjan – de la propagande et même pour Mammadov. C’était un exemple de réussite et on devait le montrer bon, généreux.
Même nous, nous ne savons pas vraiment qui il est. Il est inaccessible. Depuis mon départ, je prends toujours des nouvelles de mon pays. Avant, on faisait – c’est l’une des raisons m’ayant poussé à quitter l’Azerbaïdjan – de la propagande et même pour Mammadov. C’était un exemple de réussite et on devait le montrer bon, généreux. En réalité, c’est surtout quelqu’un de très orgueilleux. Il sera généreux si tu le glorifies, s’il en retire des bénéfices pour son égo. Je suis sûr que si quelqu’un lui dit : « Tu n’as pas d’argent » et le titillait, il serait capable de lui apporter une valise de cash.
Depuis deux, trois mois, la presse s’emporte sur Mammadov. On a toujours écrit un peu n’importe quoi quand c’était commandé d’en haut. C’est comme le coup de sa fausse arrestation. En le balançant comme ça, sachant qu’Internet n’est pas aussi démocratisé que dans les autres pays, les personnes d’en haut savaient que cela toucherait le grand public et le décrédibiliserait aussi ailleurs. On a lu que son club de Bakou avait des retards de salaire. C’est vrai, mais c’est depuis très longtemps ! Si sa garde rapprochée n’était pas contente des joueurs, ils n’étaient pas payés. Mais ils pouvaient aussi toucher des grosses primes s’ils étaient bons, en plus de leur salaire.
Cela veut forcément dire que des gens du pouvoir ne sont plus amis avec lui aujourd’hui. Mammadov a beau être puissant, il ne détient pas les clés du pouvoir. Si ces derniers décident de supprimer quelqu’un, il sera supprimé. Vu qu’il est un personnage public – et c’est sans doute voulu pour sa propre sécurité -, il faut trouver d’autres moyens : le discréditer et le ruiner
Je suis en tout cas surpris de ce revirement de situation. Cela veut forcément dire que des gens du pouvoir ne sont plus amis avec lui aujourd’hui. Mammadov a beau être puissant, il ne détient pas les clés du pouvoir. Si ces derniers décident de supprimer quelqu’un, il sera supprimé. Vu qu’il est un personnage public – et c’est sans doute voulu pour sa propre sécurité -, il faut trouver d’autres moyens : le discréditer et le ruiner. Ce n’est pas dur de nationaliser l’argent ou les biens de quelqu’un en Azerbaïdjan, l’un de mes cousins a connu ça…
Personne ne sait ce qu’il s’est réellement passé. J’ai essayé d’en savoir plus, rien à faire. On sait simplement que Mammadov a de l’argent ailleurs, mais son entreprise fourre-tout (Baghlan Group) est visiblement en ruine. Leur site n’est d’ailleurs plus en ligne, mais en construction. C’est tellement bizarre […] Il est considéré comme un escroc aujourd’hui chez nous. C’est le mot qu’on fait passer à la presse. Nous savons très bien que Mammadov a de l’argent ailleurs car il était souvent aux États-Unis ou à Londres. Il a même des parts dans des marchés asiatiques. Mais combien ? »
Il veut toujours finaliser la vente de Sheffield Wednesday
Impossible de savoir si ses comptes ont vraiment été gelés. Hafiz Mammadov a énormément d’argent, la question n’est pas là. Sinon, il ne sponsoriserait pas des pilotes automobiles ou l’Atlético, ce qui lui coûte plus de 10 millions par an. Sauf que le deal avec Sheffield Wednesday est longuet, que les 4 millions promis à Lens ne sont visiblement pas arrivés (selon certains médias, nous n’en avons aucune idée). Il se murmure en coulisses qu’il compte toujours finaliser le rachat des Owls, qui est sa priorité depuis des semaines désormais. N’avait-il pas fait publier un communiqué sur leur site officiel et non celui du RC Lens pour déclarer qu’il n’avait pas été arrêté ?
Reste à savoir de combien il dispose ailleurs qu’en Azerbaïdjan et s’il trouvera finalement un intérêt. Il faut bien comprendre qu’en promouvant son pays grâce au football, le pouvoir était forcément heureux car « Land of Fire » s’affichait de partout. Mais derrière cet investissement politique se cache souvent le principal objectif des magnats dans le football : blanchir de l’argent et en détourner. Et ce n’est pas une vue de l’esprit. Mandaric en connaît d’ailleurs un rayon, ayant géré avec Harry Redknapp un compte à Monaco au nom de la chienne de Harry pour effectuer des versements tranquilles lorsque le tandem était à Portsmouth, dont on sait ce qu’il est advenu quelques années plus tard…
http://www.hat-trick.fr/mammadov-et-she ... ca-bloque/