Le docteur Fuentes ne suivait pas que des cyclistes
LE MONDE | 06.07.06 | 14h07 • Mis à jour le 06.07.06 | 14h15
Il y a beaucoup de noms qui n'ont pas été cités, les fuites ont été sélectives." Interrogé par la Cadena Ser, dans la nuit de mercredi à jeudi 6 juillet, Eufemiano Fuentes, le médecin soupçonné d'être au coeur du vaste réseau de dopage sanguin démantelé fin mai à Madrid, a confirmé ses déclarations de la veille sur les ondes de la radio espagnole. Deux jours avant le départ du Tour de France, la Guardia Civil avait remis aux organisateurs de l'épreuve, à l'Union cycliste internationale (UCI) et aux ministères des sports espagnols et français un rapport identifiant une cinquantaine de cyclistes comme des clients présumés du docteur Fuentes. Sur la base de ce document, Jan Ullrich et Ivan Basso, les deux favoris du Tour, ainsi que sept autres coureurs, avaient été exclus de la Grande Boucle.
"Je suis indigné par le fait que l'on dise que mes traitements ne concernaient que des cyclistes. J'ai travaillé avec d'autres sportifs dans l'athlétisme, le tennis et le football", a expliqué Eufemiano Fuentes. L'ancien médecin des équipes cyclistes ONCE et Kelme a affirmé avoir collaboré "avec des équipes de football espagnoles de première et deuxième division qui ont amélioré leurs performances", précisant qu'il n'avait pas lui-même "administré les traitements" mais les avait "recommandés" aux médecins desdites équipes.
"Ces traitements biologiques, je les ai recommandés pour aider à la récupération et améliorer le rendement sportif", a expliqué le médecin qui est poursuivi pour délit à la santé publique. Fin mai, la police espagnole avait retrouvé une centaine de poches de sang dans un appartement madrilène lui appartenant.
"Ces poches étaient destinées à être utilisées dans les dix prochaines années pour traiter des problèmes que pourraient avoir les sportifs", s'est défendu Eufemiano Fuentes. Les enquêteurs espagnols ont cependant acquis la certitude que les poches de sang étaient utilisées pour des transfusions avant les grandes courses. Le médecin s'est réfugié derrière le "secret médical" pour ne pas livrer le nom des sportifs qu'il affirme avoir conseillé, précisant qu'il s'agissait de "personnes célèbres et publics qui exigeaient (s)a discrétion quand elles venaient (l)e voir".
Les déclarations du docteur Fuentes contredisent la version du ministère des sports espagnol. "Aucun footballeur ni joueur de tennis n'est impliqué", avaient fait savoir, mardi 4 juillet, les services du ministre, Jaime Lissavetsky, en réponse à un article du Journal du dimanche du 2 juillet qui laissait entendre que cinq joueurs du Real Madrid et le vainqueur de Roland-Garros, Rafael Nadal, seraient concernés.
La Fédération internationale de tennis (ITF) assurait mercredi 5 juillet "qu'aucun joueur de tennis espagnol ou étranger ne faisait l'objet d'une enquête".
"Aucun footballeur ne figure sur la liste des sportifs mis en cause", avait déclaré deux jours plus tôt, la Fédération internationale de football (FIFA). "Si des joueurs de football étaient concernés, les enquêteurs auraient utilisé la plate-forme qu'est la Coupe du monde pour en informer la FIFA", a expliqué le médecin chef de la fédération, Jiri Dvorak.
Pendant le Mondial, la FIFA a décidé de ne pas pratiquer de contrôles sanguins, pourtant seuls à même de détecter d'éventuelles transfusions. "Nous considérons la probabilité de cette pratique dans le football tellement faible que ce serait une perte de temps, d'argent et d'énergie que de faire des contrôles sanguins", avait déclaré au Monde Jiri Dvorak avant le début de la compétition.
"Seuls des cyclistes ont été cités pour le moment. Mais de nombreux joueurs de football, de tennis et des athlètes sont sur la liste", avait lancé le président de l'UCI, Pat McQuaid, après le prologue du Tour de France.
A l'UCI, on affirme que le ministre des sports espagnol aurait laissé entendre à Pat McQuaid, lors d'une rencontre à Madrid, le 1er juin, que les cyclistes ne seraient pas les seuls sportifs impliqués dans le réseau de dopage sanguin. "Les cyclistes sont les méchants et les autres ont les blanchis", résume-t-on à l'UCI.
Stéphane Mandard
Article paru dans l'édition du 07.07.06
_________________ Quand j'ecris, je suis le heros de mes conneries.
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