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Irvin Cardona, attaquant de Brest. (Aude Alcover/Icon Sport/Icon sport) Irvin Cardona, attaquant de Brest. (Aude Alcover/Icon Sport/Icon sport) Foot L1, Brest avant-première abonnés Portrait d'Irvin Cardona, auteur d'un but superbe avec Brest à Dijon
L'attaquant de Brest a inscrit un but acrobatique qui a fait le buzz, dimanche dernier à Dijon, tranchant avec un début de saison décevant.
Franck Le Dorze mis à jour le 18 septembre 2020 à 18h54 Son geste a aussitôt enflammé les réseaux sociaux, fait le tour de la planète football. Dimanche dernier, Irvin Cardona s'est envolé dans le ciel dijonnais pour consolider le succès brestois (2-0), d'une volée acrobatique impressionnante.
Alors que même DJ Snake lui a envoyé un message de félicitations, les références cinématographiques ont fleuri, de Karaté Kid à Shaolin Soccer, en passant par Olive et Tom, plus Olive que Tom en l'occurrence. Les comparaisons sportives ont foisonné. Si la FIFA a tweeté que le « pirate », surnom des joueurs finistériens, était resté « suspendu en l'air comme Tony Parker », les rapprochements ont davantage visité la sphère du football que celle du basket.
« C'est un buteur d'aujourd'hui qui ressemble à ceux d'hier » Jean-Pierre Papin Beaucoup ont cru assister au retour de Zlatan Ibrahimovic sur les pelouses françaises, quand d'autres ont vu du Luis Fernandez, auteur de deux buts en équipe de France, d'un ciseau à la verticale, face à l'Espagne (1988 et 1991). Mais Cardona, 23 ans, est surtout associé à Jean-Pierre Papin, et pas seulement parce que le premier a explosé à Bruges (le Cercle, 2017-2019), quelques années après le second (le Club, 1985-1986).
lire aussi Ligue 1 : à Brest, le manque de maturité en question Il ne s'agit pas, pour une fois, d'une coquetterie journalistique. « Je le compare toujours à Jean-Pierre Papin », assume son entraîneur, Olivier Dall'Oglio, qui avait osé le parallèle la saison dernière après son premier but en Ligue 1, à Angers (1-0, le 19 octobre), d'une frappe soudaine, déjà à angle fermé.
Mais qu'en pense l'ancien Marseillais ? Sollicité, il n'avait pas encore vu le but, mardi dernier. « Il est magnifique, s'est-il exclamé en le découvrant sur Internet. Sa course d'élan est parfaite, il prend le temps de s'équilibrer en sautant. Je n'en ai pas marqué des comme ça, mais c'est vrai qu'il a mon style. C'est un buteur d'aujourd'hui qui ressemble à ceux d'hier. Il possède une bonne frappe, aime prendre les espaces, faire des appels et contre-appels. »
« Il faisait moins d'efforts aux entraînements et, durant les matches, dans le replacement et les appels. Et il y a eu plusieurs retards... » Olivier Dall'Oglio, son entraîneur à Brest Les papinades de JPP sont restées dans la postérité. Cet après-midi bourguignon du 13 septembre 2020 va-t-il symboliser le début des « cardonades » ? On aurait apprécié profiter d'un appel pour en parler avec le héros. Mais ce fut un contre-appel du Stade Brestois pour couper court.
Une exception de la part d'un club pas réputé pour faire obstruction. « On estime que ce n'est pas le moment de le mettre en avant, justifie Grégory Lorenzi, le directeur sportif breton. On attend beaucoup de lui. On en attend davantage. Il a besoin de rester dans un cadre et on a l'impression que ce n'est pas toujours le cas. » Attention, donc, que le talent d'Irvin ne devienne un talon d'Achille.
lire aussi Cardona, le tonnerre de Brest Son coach, qui s'est entretenu avec lui durant la trêve internationale, rappelle qu'« il a changé de statut. Il faut l'assumer. Il est arrivé il y a un an, inconnu. Sa générosité, sa spontanéité et son efficacité (6 buts, 3 passes décisives en 21 matches de L 1) ont fait qu'il a vite été adopté par le public. J'attendais autre chose de son début de saison, plus d'implication. Il faisait moins d'efforts aux entraînements et durant les matches, dans le replacement et les appels. Et il y a eu plusieurs retards... Mais le football est redevenu une de ses priorités. »
« Je me souviens que, à 12 ans, Irvin venait me voir m'entraîner et me disait, sur les centres : ''Papa, tu n'as pas piqué au premier poteau !'' » Pascal Cardona, père d'Irvin Cardona Si le tableau peut paraître un peu obscur, il est vite éclairci par Lorenzi. « Il n'y a rien d'alarmant, relativise le dirigeant. C'est un garçon charmant, attachant et qui est bien entouré. » Son père occupe une place prépondérante. Pascal, passé par le centre de formation de Nîmes, la ville de naissance de ses deux fils, fut un grand buteur au niveau amateur, au Pontet, notamment.
La joie d'Irvin Cardona, la saison passée. (V. Michel/L'Équipe) La joie d'Irvin Cardona, la saison passée. (V. Michel/L'Équipe) Il est très exigeant avec son aîné et Timothy (20 ans), également attaquant. « Quand ils étaient petits, je travaillais avec eux les déplacements sur une table, avec des verres, raconte-t-il. Et je me souviens que, à 12 ans, Irvin venait me voir m'entraîner et me disait, sur les centres : ''Papa, tu n'as pas piqué au premier poteau !'' » Pas étonnant que son modèle soit, aujourd'hui, Edinson Cavani.
Précoce, passionné et prometteur, le gamin va intégrer le centre de formation de Monaco. Il remporte la Coupe Gambardella 2016 avec Kylian Mbappé (les deux buteurs en finale contre Lens, 3-0), continue à marquer beaucoup en Youth League et avec la réserve (CFA). Il goûte même au titre de champion de France 2017, choyé par Radamel Falcao. Leonardo Jardim, l'entraîneur de l'ASM, le trouve alors « bon dans le pressing, le mouvement et le positionnement ».
« Je le compare à Gaëtan Laborde, de par sa morphologie, mais aussi son parcours, puisqu'on ne lui a pas donné sa chance dans son club » Ludovic Batelli, ancien sélectionneur des équipes de France de jeunes, de 2013 à 2017 À l'époque, il est appelé en équipe de France des moins de 18 ans et moins de 20 ans. « Il était un peu en retard sur Florian Ayé et Jean-Kévin Augustin et il a mis un peu plus de temps à éclore, juge Ludovic Batelli, son entraîneur chez les Bleuets. Je le compare à Gaëtan Laborde, de par sa morphologie, mais aussi son parcours, puisqu'on ne lui a pas donné sa chance dans son club. Prêté à Bruges, on s'est rendu compte qu'il pouvait enchaîner. »
Au sein de la formation satellite monégasque, en D2 belge d'abord, il s'aguerrit et inscrit notamment le penalty de la montée. En Jupiler Pro League, la saison suivante, il enrichit ses statistiques (6 réalisations, 1 passe décisive en 20 rencontres), entre les blessures. « Quand il est arrivé, il avait un peu un côté enfant gâté, car il manquait de maturité, se remémore Emmanuel Imorou, son ancien coéquipier. Mais il ne calculait pas, il était là pour se faire plaisir et il était très adroit. »
« Il m'a dit, cet été, qu'il était dégoûté que la saison dernière n'ait pas pu se terminer et que celle qui arrivait était très importante pour lui » Florian Andreani, ami d'Irvin Cardona Vient alors le temps du départ, définitif, de la Principauté. « J'aurais aimé qu'il puisse s'imposer chez nous car il en avait les capacités, regrette Frédéric Barilaro, l'un de ses formateurs. Mais sa progression a été idéale et il va encore grandir dans un club parfait pour lui. » C'est aussi le sentiment de son ami de promotion, Florian Andreani. « Il se sent très bien à Brest, car il y a un bon groupe, assure le gardien de Toulon (N2). Il m'a dit, cet été, qu'il était dégoûté que la saison dernière n'ait pas pu se terminer et que celle qui arrivait était très importante pour lui. Mais il ne se met jamais la pression. »
lire aussi Romain Philippoteaux (Nîmes) priorité de Brest Cependant, dimanche dernier, il n'a pas vraiment apprécié d'être remplaçant pour la première fois de la saison. « Je l'ai vu à l'échauffement, il m'a à peine dit bonjour, il était énervé, alors qu'il a toujours ce flegme anglais, sourit son père. Moi, je ne fais pas de cadeau à mes enfants. Je lui ai dit : ''Un coup derrière la tête, ça fait du bien.'' Je fais totalement confiance à Oliver Dall'Oglio. » C'est à Irvin, désormais, de reprendre son envol.
publié le 18 septembre 2020 à 18h47 mis à jour le 18 septembre 2020 à 18h54 Brest (FRA) Irvin Cardona
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