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Exclusif : Vingt ans après, David Ginola raconte son passage au Stade brestois
David, dans quelles conditions êtes-vous arrivé à Brest ?
J'étais au Racing Paris et Lagardère, le président, venait de partir. Malgré que nous ayons joué la finale de la Coupe de France, le club est relégué en Division 2. J'avais besoin de me relancer et de trouver un nouveau club, un nouveau challenge. Les gens de Brest, François Yvinec, Slavo Muslin et Christian Le Garrec, sont venus me voir et j'ai dit ok. J'avais besoin de travailler dans le calme, la sérénité. François Yvinec est quelqu'un de passionné, amoureux de sa ville, de son club, de ses supporters. Je ne connaissais pas la Bretagne et quand on y arrive, avec l'accent du Sud, c'est un peu compliqué. Mais, je m'y suis plu : nous habitions Gouesnou et notre enfant Andréa est née à la clinique St Louis. Brest nous a marqué !
Quel fut votre sentiment en arrivant à Brest ?
Avec le recul, je me dis que c'était un passage obligé ! Quel club aurait pu me donner cette force de croire ainsi en mes possibilités ? Avec Brest, nous avons réalisé des performances fabuleuses. J'ai le souvenir de voir Francis Le Blé en ébullition ! On savait s'y faire respecter et il y avait un bon équilibre entre jeunes et plus anciens. Mis à part Racine Kane et Jos Van Herpen, le groupe était quand même jeune. Ce stade est vraiment extraordinaire par ce qu'il véhiculait ! J'ai le sentiment que mon séjour à Brest était écrit, fallait que j'y passe. Bon, la fin fut plus délicate avec cette impression d'être piégé par les dirigeants mais bon, je garde d'excellents souvenirs de Brest !
Comment le méridional que vous êtes s'est-il fondu dans cette ville, cette région ?
J'arrivais de Paris et de se retrouver, là, à Gouesnou, fut un peu compliqué au départ. Mais bon, j'étais venu à Brest pour travailler et la météo m'importait peu. Dans le Sud, le soleil rend un peu fainéant et là, à Brest, j'ai bossé comme un malade. Nous habitions dans une résidence et je me souviens des parties de pêche, de surf casting, le soir, à la plage. Et puis, avec un ostréiculteur partenaire du club, j'ai mangé les meilleus huîtres et homards de ma vie. Les Brestois sont des gens extras !
Au sujet du départ de Nolan Roux, un supporter a déclaré qu'il n'aura pas marqué Brest comme vous...
(Silence) C'est magnifique ! Brest, c'est vraiment une terre de foot … C'est fou ! Quand tu es ancien footballeur d'entendre cela, en France, c'est fort ! Ça me touche beaucoup. Cela prouve qu'il ya du respect, de la reconnaissance à mon égard, sur ma carrière et cela ne se limite pas à 10 secondes malheureuses avec l'équipe de France face à la Bulgarie ! Je suis vraiment, toujours, le 1er supporter du Brest Armorique ( sic ). Je veux dire à ce supporter que si il a gardé de moi un bon souvenir, cela a été réciproque.
Suivez-vous toujours les résultats de Brest ?
J'ai toujours été convaincu que Brest reviendrait, un jour, en Ligue 1 ! En 1991, on s'est battu, moi le premier, pour que ce club continue à vivre même différemment mais pour que des jeunes continuent à y jouer ! Et puis, il fallait aussi penser à ceux qui allaient signer, à Brest ou ailleurs. Une de mes plus belles victoires, dans ma carrière, a été de sortir la tête haute de cette fin du Brest Armorique. On a fait le boulot, nous les joueurs. Nous avons été pris en otage et nous n'y pouvions rien. Je suis vraiment content que le club soit revenu dans l'élite : ce fut long mais Brest est une ville de foot et son public le mérite.
Quel était le secret de cette équipe qui produisait un superbe football ?
La préparation physique était telle que l'on pouvait jouer un match à fond ! C'était impressionnant .. On travaillait dur à l'entrainement et on pouvait, avec cela, être excellent pendant 90 minutes : je me suis vu, en fin de match, sur des terrains difficiles, faire des accélérations qui laissaient l'adversaire sur place. Cette équipe pouvait déplacer des montagnes : la défense était costaud, au milieu il y avait Momo Bouquet et ses trois poumons et moi, je servais de fer de lance aux Salaün et Cloarec qui allaient à 200 à l'heure ! Et puis, on fournissait beaucoup de jeu : Slavo Muslin est un super entraineur qui avait été un très bon milieu de terrain. On prenait beaucoup de plaisir à travailler avec lui. Cette équipe était efficace, équilibrée et homogène.
Lors du dernier match du Brest Armorique en novembre 1991, à Guingamp, vous étiez présent et avez même pris la parole pour calmer les supporters brestois déçus, écoeurés et énervés. Quels souvenirs gardez-vous de cette soirée ?
Ni gâchis, ni tristesse. C'est depuis ce jour-là que je me suis mis Noël Le Graet à dos ! Il faut savoir, qu'à cette époque, nous n'étions plus payé de puis 3 mois. Comme j'étais la capitaine, certains joueurs venaient me voir pour me dire qu'ils avaient les banquiers qui les appellaient. Nous avions un sponsor et nous avions décidé de ne pas le mettre en avant, avant ce match si nous n'étions pas payés. Cela a crée un conflit avec Noël le Graet mais nous ne voulions pas céder. On nous a promis qu'avec le transfert de certains joueurs la somme acquise servirait à payer les salaires. Nous n'étions pas d'accord car c'étaient, encore nous, les joueurs, qui faisions les efforts ! J'étais un jeune joueur et là, j'ai pris 10 ans de maturité : il fallait gérer les copains, les gamins du centre de formation. C'était incroyable … Le Brest Armorique n'avait pas de solides fondations. Y'avait de la qualité mais c'était trop instable. Avec le recul, je me dis que ce n'était pas plus mal de repartir à zéro. Mieux valait tout détruire pour mieux reconstruire et on voit qu'aujourd'hui, le club est plus costaud et a des bases solides. En quelque sorte, je suis heureux d'avoir participé, un peu, à ce renouveau !
Cette équipe de 1990-1991 avait beaucoup de qualités et, derrière, pointaient de jeunes joueurs comme Guivarc'h, Makelele et d'autres. François Yvinec nous disait récemment qu'il a manqué 2 ou 3 années à cette équipe pour en faire un grand club. Le pensez-vous également ?
Oui, franchement ! Sans cette situation financière difficile, le club aurait pu aller très haut. Il y avait de la qualité chez les pros, mais aussi avec les éducateurs, les instructeurs du club. Cette équipe du Brest Armorique défrayait la chronique, même nationale, par la qualité de son jeu, sa fraîcheur et était même, grâce à Slavo Muslin, devenu référent quand à son jeu ! Oui, mais voilà, malgré sa passion, François Yvinec a mal calculé son coup, financièrement parlant. Un club de foot doit se gérer comme une entreprise avec un bilan et là, ça a été catastrophique. Mais oui, cette équipe, avec 2 ans de plus, était au sommet. Je pense même que le Brest Armorique aurait été le FC Nantes des années 90 ! Rageant …
Vous partez, ensuite, au PSG et là, vous retrouvez nombre d'ex-brestois comme Le Guen, Lama, Colleter, Guérin ou Cloarec. Ne l'avez-vous pas vécu, un peu, comme le prolongement du Brest Armorique ?
Déjà, le « fan club David Ginola » m'a suivi au PSG, De 1992 à 1995, nous avons vécu une période remarquable avec une équipe talentueuse. Avec les anciens brestois, nous avons souvent évoqué Brest. Par exemple, entre Patrick Colleter et moi, y'avait une grande complicité sur notre côté gauche et le fait d'avoir joué à Brest, même si nous n'y étions pas ensemble, cela nous a renforcé. On évoquait nos souvenirs : j'aimais beaucoup aller à Bénodet, au Golf de l'Odet, à Audierne manger chez M. Bosser. Nous avions une relation remarquable avec un point commun : Brest !
David, si vous aviez un mot à dire aux supporter brestois ?
Breizh Atao ! Je remercie le public brestois d'avoir cru en moi, de m'avoir porté, de m'avoir accordé une 2è chance après Paris. Tous les samedis, ce public me portait. La deuxième saison, en Division 2, fut plus compliquée : pas facile, quand tu as goûté aux stades comme Marseille, Bordeaux ou Paris, d'aller à Cuiseaux-Louhans ou La Roche, même si je respecte beaucoup ces équipes ! Mais, faut nous comprendre, nous les joueurs …. En plus, la situation était délicate ! Je crois qu'à Brest, j'ai tout vécu : l'euphorie, le beau jeu, les espoirs, la D1, la D2, la chute, le dépôt de bilan. C'est un gâchis pour les supporters qui eux, ont subi cela. En Division 2, c'était dur pour moi avec un coach adverse qui disait à son joueur : « Ginola, tu le tiens, tu ne le lâches pas ! Tu le marques à la culotte. Je remercie encore ce public de m'avoir soutenu ! Qu'ils continuent à croire en leur club. Brest ne gagnera jamais une Coupe d'Europe mais il va jouer les trouble-fêtes en Ligue 1; former des jeunes car cette région est amoureuse de son club … Oui, que les supporters continuent à aller au stade, il faut que Brest reste en Ligue 1 …source : http://www.brest.maville.com/sport/deta ... 8_actu.Htm
_________________ Fier d'être brestois.
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